La rue c’est fait pour personne. À Lazare j’ai trouvé une famille !
Je suis arrivée à Lazare le 29 octobre 2015 à 17h30, après 3 mois de rue. Avant j’avais une situation, des enfants, un boulot, c’est arrivé du jour au lendemain. Trois mois c’est court et c’est long à la fois, la rue c’est fait pour personne. J’étais fatiguée j’avais les jambes enflées et puis aussi il y avait le regard des gens. Pourtant j’étais habillée comme aujourd‘hui, je me lavais ! Mais la différence c’était mon sac d’affaires que j’avais toujours avec moi. Beaucoup de personnes ont peur des personnes de la rue, pourtant on a tous le sang rouge et les larmes salées. Je me suis rendu compte que je devenais méchante et je me suis dit qu’il fallait que j’en sorte le plus vite possible.
On m’a parlé de Lazare et j’ai passé un entretien avec Loïc, le responsable de maison, mais au début j’ai dit non. Je ne me voyais pas vivre avec 7 autres filles. Et puis j’ai changé d’avis.
À Lazare j’ai découvert un lieu de grande bienveillance, une famille.
Tout à coup je n’étais plus seule. Je suis quelqu’un de très attaché, protecteur. Je n’ai pas changé mais ça m’a permis de donner encore plus aux gens. J’essaye de donner tous les jours, ne serait-ce qu’un sourire. J’insiste vraiment sur le fait de faire attention à tout le monde.
À Lazare on fait des rencontres incroyables, on vit avec des gens qu’on n’aurait jamais rencontrés ailleurs.
J’ai vécu des moments durs : la mort brutale de deux de nos colocs ou le premier départ de mes coloc filles ; mais aussi des moments inoubliables : ma rencontre avec le président, avec le pape, le mariage de mes colocs. Ici il n’y a pas un jour qui ressemble à l’autre malgré la routine. Au Mont Saint Michel au WE national il y a deux ans on nous posait 3 questions sur « l’avant », « le pendant » et « l’après ». Je n’arrivais pas à répondre à « l’après ». Maintenant je peux : je suis une passionnée de musique, j’ai appris à être DJ avec un de mes colocs. Je voudrais mettre de la musique en maison de retraite, les musiques de leur jeunesse, pour leur redonner le sourire.